samedi 17 juillet 2010
stricteternum
Analyse : un film gigogne
Nous découvrons dans la scène d’exposition du film, un couple vivant dans un petit pavillon enneigé. La femme à la fenêtre conseille à son mari bricolant la voiture de rentrer avant d’être surpris par la tempête de neige. Mais à y regarder de plus près, le décor nous apparaît artificiel. La
maison, les sapins enneigés et de manière plus accentuée l’intérieur de la maison nous font entrer dans un univers décalé et kitch (les motifs et les couleurs de la tapisserie comme ceux des vêtements). La bizarrerie est au rendez-vous : c’est un monde de poupées et de boîtes gigognes où
évolue un couple se plaignant de la répétition du quotidien. Soudain un bruit sourd (comme les pas d’un ogre de conte pour enfant) fait se précipiter les protagonistes vers deux fauteuils où ils s’attachent comme s’ils étaient dans une fusée au décollage. La caméra sort alors en zoom* arrière
pour découvrir la boule à neige dans laquelle nous étions sans le savoir. Une jeune femme scandinave dans un sauna retourne la boule avant de se poster à la fenêtre pour prévenir son mari qu’il devrait rentrer afin d’éviter la tempête de neige. La boucle est bouclée ou plutôt la boucle
s’ouvre à l’infini : nous, spectateurs, serions peut-être, nous-mêmes, dans une autre boule à neige.
Stricteternum revient sur ce motif récurrent au cinéma, soit la petitesse d’un monde vue d’une caméra surplombante.
Motif : d’un monde à l’autre
Deux fois dans Stricteternum la caméra révèle un monde s’emboîtant dans un autre plus grand. Les yeux de la jeune femme scandinave regardant en gros plan* la boule à neige sont un peu les nôtres qui regardent le film. Les personnages sont prisonniers de ces mondes comme Jim Carrey à
l’intérieur de la ville-studio dans The Truman Show de Peter Weir (1998). Stricteternum, par sa fantaisie et son atmosphère étrange (voire angoissante), peut faire penser à quelques séquences d’autres films : le plan de la maquette du labyrinthe filmée en plongée et enchaînant sur la même
vue en plongée mais en taille réelle avec les personnages qui s’y déplacent dans The Shinning de Stanley Kubrick (1980) ou le début de Beetlejuice de Tim Burton (1988) où une maquette urbaine s’anime ou du même Burton la maison dans Charlie et la chocolaterie (2005) reconstituée à
l’intérieur de l’usine comme à l’intérieur d’une boule à neige, neige qui tombe dans l’ouverture de Edward Scissorhands (1990)…
Voir et revoir
Les poupées et l’enfant. Outre des poupées gigognes, il y a dans des boîtes en carton des poupées miniatures comme des
polichinelles. N’oublions pas qu’à l’origine « gigogne » se disait des femmes qui avaientt beaucoup d’enfants. Ici, il y a comme une enfant cachée (une photo posée sur la cheminée nous prouve son existence) : elle est attachée dans un coin de la pièce et ses yeux fermés sont maquillés en d’autres
yeux rappelant ceux d’une poupée. Le film de Didier Fontan laisse cette piste narrative sans résolution ce qui confère au film son caractère étrange.
Le générique
Le générique peut parfois faire partie intégrante du film (le plus célèbre est sans doute celui en spirale de Vertigo d’Hitchcock (1958). Ici l’astuce de Didier Fontan est de l’avoir inséré à l’histoire. Lorsque le mari demande par dépit à sa femme si elle n’est pas lasse de voir à la télévision le même programme, nous constatons dans les plans où apparaît le téléviseur que c’est le générique de
Stricteternum qui défile. La musique du film opère de la même manière : elle est en fait la musique de la boule à neige activée par une clé que l'on remonte.
Conception et réalisation
Michel Boiron et Isabelle Barrière (CAVILAM)
http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/IMG/pdf/Stricteternum.pdf
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